A quand le glas de l’impunité ?
« Que
me servirait que ma patrie fût puissante et formidable, si, tristes et inquiet,
j’y vivais dans l’oppression et l’indigence ? »
Jean de la
Bruyère
Les Caractères
13
décembre 1998 – 13 décembre 2013. Voilà déjà quinze années pleines que Norbert
Zongo, journaliste burkinabe de renommée internationale est réduit en cendre à
7km de Sapouy dans la province de Ziro, au Burkina Faso. Un crime hautement
cruel que les burkinabe garderont longtemps dans leur mémoire collective, dans
leur histoire. Notre république a tué ses fils et en tue encore, à quand la fin
du massacre ? A quand la justice pour les victimes ? Quand est-ce que
les burkinabe vivront dans la quiétude en espérant que ce soir ou demain il ne
mourront pas pour avoir dit ou fait ceci ou cela ? Quand est-ce que la
justice aura son mot à dire sans que le commun des burkinabe sensés ne trouve
de l’incohérence, ou de dépendance vis-à-vis de l’exécutif longtemps maitre de
la justice et du législatif ?
Ce jour 13 décembre
2013, le peuple burkinabe pleure Norbert Zongo qui a été lâchement assassiné il
y a quinze. Le peuple pleure aussi le nombre inestimable de ses fils et filles
victimes de leur propre pays. En effet, cette commémoration sera l’occasion de
rappeler la mémoire de ceux qui sont restés sur le champ de bataille, ceux qui
sont mort pour rien et ceux dont les parents ne sauront jamais ce qu’on a fait
d’eux. La liste est longue, très longue, et continue de s’écrire. Les victimes
sont nombreuses, très nombreuses mais dans l’ombre on n’en finira pas de
citer : Oumarou Clément, Boukary Dabo, Norbert Zongo, Flavien Nébié, Romual
Somda, plus proche de nous, Justin Zongo, etc. Sans compter de très nombreux anonymes.
Pire, la justice n’est plus opérante. Elle juge et condamne les petits voleurs
de quartier, les petits fumeurs de drogue ou de dissolution qui commettent des
larcins dans le quartier. Nos grands voleurs et grands tueurs ne sont pas
cachés et ne sont pas inquiétés. Pire, ils sont décorés et on crie
encore : « VIVE LA REPUBLIQUE ! ». Oui, la République, mais
quelle République ?
Une république dans
laquelle on nous fait croire que la justice est un pouvoir indépendant et
impartiale. En effet, la loi veut que nous ayons droit à trois pouvoirs :
exécutif, législatif et judiciaire. Dans notre République, comment croire
encore à l’idée du serpent à trois têtes quand on sait que le pouvoir
législatif n’est là que pour dire « oui » à tout ce qui vient de l’exécutif
quand les deux ne se confondent pas tout simplement. Comment croire au
législatif quand on sait que le parti de l’exécutif a toujours la majorité
absolue des sièges et que ses hommes ne jurent jamais au nom de leurs convictions,
de la ligne du parti, mais jurent au nom du Chef de l’Etat, chef de l’exécutif,
maitre suprême de la magistrature ? Comment croire encore que notre
législatif et notre judiciaire fonctionnent quand on voit que seules les
volontés du président de la république passent. Pour exemple, sur les derniers
événements au sujet du sénat, malgré le rejet quasi catégorique de l’opinion
publique le président nous crie haut et fort qu’il va faire appliquer « la
constitution » n’en déplaise au peuple alors que quand il est question de
sa présentation en 2015, on le sait tous, la constitution ne semble pas avoir
la bonne réponse à ses préoccupations et il sous-entend la manipuler donc « ne
pas la défendre » dans ce sens.
Le
« pays des hommes intègre », endeuillé et indigné, est une bombe à retardement
qui ne va pas tarder à exploser. Trop de gens pleurent en silence, trop de rancœurs
sont tus, trop de cœurs « brisés et froissés ». Quand les hommes et
les femmes sont blessés dans leur dignité, les choses se compliquent toujours davantage.
Nous sommes en crise sociale profonde et les choses sont encore masquées en
attente d’un déclenchement. Nos dirigeants ont intérêt à revoir leurs
politiques. Il est vrai qu’il n’existe, pour l’instant, nulle loi qui interdise
de parler d’affaires internes à l’extérieur. Il n’existe pas non plus de loi
qui interdise de faire la paix à l’extérieur, mais les peuples ne crient jamais
pour rien. Peu importe le nombre de fois que l’on a donné la paix dehors (même
si on en a autant mis le feu), peu importe le poids du budget national, les
milliards injectés pour le 53e anniversaire, le développement des
villas et de riches ou de leurs ventres. Tant que le peuple ne vivra pas en
suretés avec un minimum de sécurité et de justice sociale, on vivra dangereusement
et sans certitude du plus proche lendemain. Je vous reprendrais la citation
ci-dessus de Jean de la Bruyère avec ma pensée comme suit : je m’en fous
que mon pays soit médiateur, qu’il se fasse les beaux yeux à l’impérialisme,
qu’il soit un « ambassadeur » sous régional de l’affreuse
France-Afrique ; je me moque de l’image extérieure que les gens se font du
pays alors que dans le fond, je suis blessé dans mon amour propre ET LE PEUPLE
PLEURE CHAQUE JOUR SES MORTS DONT LES CADAVRES SENTENT SI BON A CERTAINS POLITICIENS.
Peu importe le temps
Norbert Zongo et tous les martyrs vivront en nous et continueront de faire peur
« aux assassins ».
QUE JUSTICE SOIT !
« MALHEUR A CEUX
QUI BAILLONNE LEUR PEUPLE ET TENTENT DE LUI IMPOSER LE SILENCE ! »
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