samedi 26 janvier 2013

Nouveaux maires du Burkina Faso


Cinq ans de terreur ?

A peine la campagne drôle et affreuse pour les premières municipales et législatives couplées de l’histoire du Burkina terminée, certains élus entrent dans des zones de turbulence inimaginables. C’est à peine si l’on ne se demande pas pourquoi les gens se font élire. Si Pobé-Mengao (commune de la province du Soum) a vu un potentiel candidat à la succession de l’ancien maire mourir de deux coups de feu à bout portant[http://moussadicko.blogspot.com/2012/12/fratricide-pobe-mengao_5647.html], d’autres villes et villages ont vu tour à tour déferler des troupes de bidasses chez eux tantôt pour déguerpir des manifestants contestants le déroulement ou le verdict du scrutin, tantôt pour sécuriser les mairies les jours d’élections des maires. Que seront donc cinq ans de gestion de ces hommes qui ont peur de leurs électeurs ?

Au Burkina Faso, les élections comptent parmi les choses qui divisent le plus l’opinion. Bien que les bulletins soient secrets, nombreux sont ceux-là qui, après les élections, préfèrent ne même plus adresser la parole à leur proche parent ou voisin. Ils sont également si nombreux, ceux-là qui votent « au nom de papa », de grand père, ou « du village ». Les plus fous vont jusqu’à dénigrer leurs adversaires en leur traitant d’ « esclave », de « peul », de « mossi », etc. toutes choses qui alimentent le rejet de l’autre sur des bases ethnique et tribale. En plus de cela, les burkinabè ont si longtemps misé sur toutes les formes de corruption électorale et d’hypocrisie que les campagnes et les consultations électorales sont devenues une sorte de pagaille dans laquelle les plus modestes et honnêtes candidats sont ridiculisés.

L’opinion demeure plus que jamais confuse, les élus sont apeurés et les forces de l’ordre en alerte partout où les élections sont au programme. Pobé-Mengao, à l’instar de plusieurs autres communes du Burkina Faso, a connu une phase de consultations électorales trouble mais s’est tout de même retrouvé avec le même bourgmestre. Ils sont nombreux les observateurs extérieurs qui ne revoyaient pas certains maires de retour à l’hôtel de ville ! Hélas, ils sont tout de même nombreux à « renouveler » leur adhésion à l’AMBF (Association des Maires du Burkina Faso). Les interprétations vont bon train et dans certaines zones les « grains thé» en discutent d’une façon inquiétante.

Par ci on décrie un maire arrogant entouré d’hommes violents, par là un maire incompétent et insouciant, de l’autre côté on pleure que le maire et les deux adjoints sont illettrés et corrompus, et quoi encore ! Pourtant, dans le fond, c’est la même population qui a élu cette « bande » d’arrogant, violents, incompétent, insouciant, illettrés et corrompus. Ce qui est le plus comique mais pas surprenant, c’est qu’au sein même des partis majoritaires on trouve souvent des gens qui soutiennent des scissions entre les membres du même parti dans d’autres communes que les leurs. Les esprits s’échauffent et de plus en plus on assiste à des « résistances » vis-à-vis des nouveaux ex-maires (sic). Dans une commune rurale du Soum, les nouveaux opposants du maire qui sont d’anciens collaborateurs proches promettent de dénoncer les sales combines dont le maire a fait usage dans son précédent mandat !

Ce qui est d’autant plus difficile à réaliser, c’est la force et la vigueur par laquelle nos hommes s’investissent pour diriger rien qu’une mairie. Si on fait tant pour une mairie, que feront nous pour des postes politiques plus importants ? Organiser des meetings et de grandes manifestations en jetant de l’argent sur musiciens et artistes, regrouper hommes et femmes les monter les uns contre les autres, rien que pour gérer le bien commun, c’est ce qui est à la mode. Au XXIe siècle, de surcroît en pays pauvre, on a beaucoup plus besoin de gens engagés à soutenir des projets de développement que des gens qui savent gaspiller de l’argent pour des campagnes électorales. A Djibo comme beaucoup d’autres communes, on trouve des gens qui sont prêt à tout pour ne jamais céder leur place. Pire, la politique y est toujours une affaire de clan dans laquelle depuis des siècles, « l’histoire a déjà établit une hiérarchie ». Oui, avouons, nous mauvaise habitude, en Afrique, d’être complexés par la pire histoire des histoires, celle des esclaves. Alors que nos pères vendus aux Etats-Unis ont sacrifié leurs vies pour la Liberté et nous pour l’Indépendance, qui s’accompagnent de l’abolition de l’esclavage et des mauvaises pratiques racistes, nous restons diviser pour le seul fait que nous soyons différents.

Plus que jamais, il est nécessaire que les burkinabé en général, et les populations rurales en particulier sachent faire la différence entre les divisionnistes qui ont tendance profiter de leur vulnérabilité et ceux qui véritablement se battent pour un mieux être autour d’eux. Pour ce faire, il est nécessaire de commencer par bannir de notre société toute idée d’accès à n’importe quelle poste de responsabilité par la corruption, la fraude, le mensonge, l’usage de préjugés ethniques et raciaux, etc. Pour être un acteur du développement, pas besoin d’être un politicien !